Un plan n’est pas une construction artificielle, plaquée sur un devoir pour satisfaire le bon vouloir des enseignants. Il répond à une problématique de façon réfléchie et organisée, comme l’explique Myriam Greuter, auteure de Bien rédiger son mémoire ou son rapport de stage, publié aux éditions l’Etudiant. Extraits.
Au moment de concevoir et rédiger un plan, la question à se poser n’est donc pas « Quel est le plan auquel pense le prof ? », ou « Comment tout caser en trois parties qui fassent leur petit effet ? », mais, tout simplement, « Qu’est-ce que je veux dire ? ». Un plan est en effet uniquement une façon d’organiser logiquement sa pensée. Il répond à une problématique.
La problématique
Parmi toutes les définitions entendues depuis le lycée, il est difficile d’en trouver une seule qui montre clairement ce qu’est une problématique. Pour essayer de comprendre, vous pouvez cependant vous replonger dans des manuels de méthodologie, ou bien vous rappeler vos meilleures dissertations, celles où vous avez vraiment le sentiment d’avoir réfléchi.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit : de réflexion. Pour parvenir à une problématique, la seule chose à faire est effectivement de réfléchir. Tout commence par un examen des sources. Petit à petit, à force de réflexion et d’analyse des sources, par un processus qui s’accomplit en partie dans l’ombre et qu’il est impossible de détailler, au milieu des idées et des pistes de réflexion émerge une question centrale, qui va vous permettre d’analyser l’ensemble du corpus et d’exprimer une pensée. C’est la problématique.
La problématique est la question qui montre en quoi et pourquoi le sujet fait problème, pourquoi il mérite d’être examiné. C’est en fait à la fois une interrogation et un point de vue sur la question ; en elle est déjà contenu le cheminement que la pensée va suivre pour résoudre le problème. La pensée suit une sorte de mouvement crescendo/decrescendo : d’abord, on réfléchit pour arriver de manière logique à une problématique, puis on restitue dans le devoir le cheminement qui nous a amené à elle et à ses conclusions. C’est au cours de ce processus que naît le plan.
Les deux fonctions du plan
Le plan a deux fonctions : éviter que le lecteur ne se demande où il en est et où vous voulez en venir, et transformer vos réflexions en une démonstration.
Le plan guide le lecteur pour qu’il parvienne à la conclusion, convaincu par vos propos. Songez par exemple à certains cours ou textes que vous avez pu rencontrer : certains vous ont donné l’impression d’une suite tortueuse d’idées disparates, les autres au contraire d’un raisonnement clair, bien dirigé, orienté logiquement jusqu’au dernier mot.
Un bon plan est en fait un plan que la logique et la cohérence imposent, dans lequel le passage d’une partie à une autre n’est pas arbitraire.
« Dans un plan digne de ce nom, explique Fériel, doctorante en
musicologie, les enchaînements ne signifient pas : “Voilà ce que j’ai
examiné jusque-là, maintenant passons à autre chose”, mais “J’en suis
arrivé à un point qui fait que je dois passer à une position
différente”. »
« Je n’ai rien à dire… »
Pour le mémoire
Pour le mémoire, le sentiment de n’avoir rien à dire est une illusion, une angoisse qui précède l’élaboration du plan. Il suffit généralement de commencer à faire la liste des matériaux accumulés pendant la phase de documentation pour s’apercevoir que le danger est plutôt d’avoir trop de choses à exposer dans les pages et le délai impartis.
Par ailleurs, lors de la rédaction, on écrit toujours plus que ce que l’on prévoyait ; on est en effet forcé de développer et d’expliquer ce qui se trouvait ramassé dans un simple titre, ou en quelques lignes. Enfin, il est fréquent que des idées ou des remarques nouvelles surgissent au cours de la rédaction : de quoi remplir aisément les quelques dizaines de pages nécessaires…
Pour le rapport de stage
Pour le rapport, un cas particulier peut par ailleurs se présenter. C’est celui du « mauvais stage », pendant lequel on a majoritairement effectué des tâches inintéressantes ou répétitives (lire l’article : « Rapport de stage : le témoignage de Grégoire, déçu par son stage »). Comment, alors, rédiger malgré tout un rapport digne d’intérêt ?
La première solution consiste à développer surtout la dernière partie – celle du bilan : « Si l’expérience professionnelle reste peu palpitante, l’étudiant se concentrera sur l’analyse critique », explique ainsi Yann, enseignant en BTS. « On peut par exemple se montrer critique sur la démarche du labo, renchérit Nathalie, étudiante en biologie. Mais attention : il faut être bien sûr de soi. En général, les tâches en elles-mêmes ne sont pas intéressantes, mais les résultats peuvent l’être ; l’étudiant peut alors insister sur ses résultats, ou sur ceux de l’équipe en général. »
Cette deuxième solution, moins risquée, est très recommandée : il s’agit de chercher, au-delà de son expérience personnelle, un intérêt au travail mené ailleurs sur le lieu de stage. « L’étudiant peut par exemple s’attacher à souligner l’intérêt du thème de recherche du labo, en s’appuyant sur la bibliographie », explique Nathalie. Il est en effet toujours possible de dépasser le cadre de son travail : « En cas de maintenance d’appareils, plutôt que d’exposer seulement ce que l’on a fait, on peut par exemple détailler le fonctionnement, le type d’utilisation de l’appareil, les améliorations possibles… », explique Jean-Marc, professeur en DUT génie thermique et énergie.
Sans s’en rendre compte, on effectue alors une analyse : « Chercher des infos, des ordres de grandeur, c’est cela que nous demandons dans un rapport de stage. La pose de bordure par exemple est une tâche ingrate par excellence. En revanche, si l’on a l’idée d’indiquer le temps nécessaire pour la pose d’un mètre de bordure, on se situe dans une analyse, et le rapport de stage sera bon », renchérit Jean-Philippe, professeur en DUT génie civil.
La troisième solution consiste à « ne pas se laisser bloquer par une impression défavorable, comme le dit Michèle, professeur en BTS diététique. Dans une entreprise, de multiples tâches sont effectuées par les employés. Il faut analyser l’organisation mise en place. » Bref, comme le résume un autre enseignant, « il faut chercher pourquoi certaines tâches qui paraissent ennuyeuses sont néanmoins nécessaires à l’entreprise ». Ainsi, s’il ne sert à rien de décrire un procédé d’inventaire de A à Z, on peut en revanche expliquer qu’un inventaire permet à l’entreprise de rédiger son bilan comptable et d’inventorier les stocks. Chacun a les moyens de rédiger un bon rapport. Sachez-le : c’est le rapport que l’on note, pas le stage.
En fait, le plan ne demande pas d’effort de création : vous n’ajoutez rien, vous ordonnez. Partant de là, l’étape du plan est souvent moins redoutable qu’elle peut en avoir l’air. Il suffit de se débarrasser de quelques idées fausses, et de toujours chercher à se mettre dans la peau de celui qui vous lira.